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ღ♥  Mon aire de repos  ღ♥
22 juillet 2006

Jean-Paul Sartre

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J’aime cet auteur, je trouve qu’il écrit très bien en restant accessible à la compréhension du lecteur. Pour l’instant, je n’ai lu que peu de ses œuvres. Seulement trois de ses pièces de théâtre : Huit Clos, La P… respectueuse et Morts sans sépulture. Je dois avouer avoir été surprise, je ne connaissais pas le style de l’auteur et j’ai tout de suite été charmée.

*

            Huit Clos et son célèbre « L’enfer c’est les autres » entretient à merveille une atmosphère étouffante et cependant le lecteur ne peut pousser l’indécence jusqu’à s’en écarter tant cette pièce est captivante. L’aspect de l’illusion, le tout est faux, tout est noir, du monde dans lequel nous vivons est largement entretenu par la personnalité des trois personnages. A lire absolument, même si après cela, le risque de ne plus voir les Hommes de la même façon est encouru.

*

            

          La P… respectueuse maintenant. La fin est un peu décevante, elle prouve bien que l’honnêteté ne paie pas, cette femme se fait acheter, signant ainsi une nouvelle captivité. Faut-il donc voir ici une invitation à être malhonnête ? A méditer, bien évidemment. L’histoire de cette femme, cette p…. qui découvre un monde où les hommes sont prêts à toutes sortes d’injustice, un monde où le racisme est probant est cependant intéressante. D’autant plus que l’on retrouve l’aisance de l’auteur à peindre les vérités concernant « l’homme blanc » qui est véritablement dépeint comme le bourreau de « l’homme noir. ». A lire aussi.

                                             

La_P

                                    

*

            Morts sans sépulture, je crains d’en parler de peur de dénaturer ce chef d’œuvre, car s’en est véritablement un. Des membres d’un réseau de résistance durant la seconde guerre mondiale, des français torturés afin qu’ils vendent leur chef. Horrible par ce qui est décrit, magnifique par la manière dont ça l’est. Peu à peu, au fil des lignes, le lecteur assiste à la déshumanisation des prisonniers par dévouement à leur pays. A lire, voire relire absolument.

***

            Ayant commencé Les Mots, il faut bien reconnaître que Sartre est vraiment doué pour l’écriture. Plus qu’une simple autobiographie, c’est ici une véritable mine d’or par sa richesse stylistique. Je répertorie ici quelques citations qui m’ont marquées, à raison d’environ une par page, je ne sais pas si j’irai au bout de ce travail…

Les meilleures citations : Les Mots

« Il garda toute sa vie le goût du sublime et mit son zèle à fabriquer de grandes circonstances avec de petits évènements. »

«  Cette femme vive et malicieuse mais froide pensait droit et mal, parce que son mari pensait bien et de travers. »

«  Il lui fit quatre enfants par surprise. »

« [Il] passa sa vie à se battre contre les mots. »

«  Il fit [sa] connaissance […], lui fit un enfant au galop, moi, et tenta de se réfugier dans la mort. »

«  [Elle] le soignait avec dévouement, mais sans pousser l’indécence jusqu’à l’aimer. »

« Il n’y a pas de bon père, c’est la règle ; qu’on n’en tienne pas grief aux hommes mais au lien de paternité qui est pourri. Faire des enfants, rien de mieux ; en avoir, quelle iniquité. »

« J’ai laissé derrière moi un jeune mort qui n’eut pas le temps d’être mon père et qui pourrait être, aujourd’hui, mon fils. »

« Je comptais mon deuil au nombre de mes vertus. »

« Restait le patriarche : il ressemblait tant à Dieu le Père qu’on le prenait souvent pour lui. »

« [Il] avait versé les quelques gouttes de sperme qui font le prix ordinaire d’un enfant. »

« [Il] pouvait jouir de moi sans me posséder. »

« Il fut le Dieu d’Amour avec la barbe du Père et le Sacré-Cœur du Fils. »

« Dans une passion si publique, j’ai peine à distinguer la sincérité de l’artifice. »

«  Je ne sais ce qu’il dit : j’étais trop soucieux d’écouter pour entendre. »

« Nous imaginions des traverses à notre amour pour nous donner la joie de les écarter. »

« Dans la lutte des générations, enfants et vieillards font souvent cause commune : les uns rendent les oracles, les autres les déchiffrent. La Nature parle et l’expérience traduit. »

« Quand on aime trop les enfants et les bêtes, on les aime contre les hommes. »

« Le Bien naît au plus profond de mon cœur, le Vrai dans les jeunes ténèbres de mon Entendement. »

« Je leur offrirai sans défaillance le plaisir délicat qui m’est refusé. »

« Je ne cesse de me créer ; je suis le donateur et la donation. »

« Je sais qu’ils manquent du nécessaire et il me plaît d’être leur superflu. »

« Mon grand-père croit au Progrès, moi aussi : le Progrès, ce long chemin ardu qui mène jusqu’à moi. »

« Suspecte et peccamineuse, ma grand-mère, toujours au bord de faillir, était retenue par le bras des anges, par le pouvoir d’un mot. »

« Je [les] déteste, pableu, mais sans conviction. »

« Suis-je donc un Narcisse ? Pas même : trop soucieux de séduire, je m’oublie. »

« Cela montre ce que je suis au fond : un bien culturel. La culture m’imprègne et je la rends à la famille par rayonnement, comme les étangs, au soir, rendent la chaleur du jour. »

« J’ai commencé ma vie comme je la finirai sans doute : au milieu des livres. »

[A propos des livres de son grand-père]

« Quelquefois je m’approchais pour observer ces boîtes qui se fendaient comme des huîtres et je découvrais la nudité de leurs organes intérieurs, des feuilles blêmes et moisies, légèrement boursouflées, couvertes de veinules noires, qui buvaient l’encre et sentaient le champignon. »

[A propos des livres de sa grand-mère]

« Vifs, blancs, presque neufs, ils servaient de prétexte à des mystères légers. »

« Des phrases en sortaient qui me faisaient peur : c’étaient de vrais mille-pattes, elles grouillaient de syllabes et de lettres, étiraient leurs diphtongues, faisaient vibrer les doubles consonnes ; chantantes, nasales, coupées de pauses et soupirs, riches en mots inconnus, elles s’enchantaient d’elles-mêmes et de leurs méandres sans se soucier de moi : quelquefois elles disparaissaient avant que j’eusse pu les comprendre, d’autres fois j’avais compris d’avance et elles continuaient de rouler noblement vers leur fin sans me faire grâce d’une virgule. »

« La bibliothèque c’était le monde pris dans un miroir ; elle en avait l’épaisseur infinie, la variété, l’imprévisibilité. »

« J’allais du savoir à son objet ; je trouvais à l’idée plus de réalité qu’à la chose, parce qu’elle se donnait à moi d’abord et parce qu’elle se donnait comme une chose. »

« Je restais  seul, je m’évadais de ce banal cimetière, j’allais rejoindre la vie, la folie, dans les livres. »

« Je suis homme et rien d’humain ne m’est étranger. »

« Dans la Beauté, mon grand-père voyait la présence charnelle de la Vérité et la source des élévations les plus nobles. En certaines circonstances exceptionnelles _ quand un orage éclatait dans la montagne, quand Victor Hugo était inspiré _ on pouvait atteindre au Point Sublime où le Vrai, le Beau, le Bien se confondaient. »

« J’ai trouvé ma religion : rien ne me parut plus important qu’un livre. La bibliothèque, j’y voyais un temple. »

« Je regagnais mon sixième symbolique, j’y respirais de nouveau l’air raréfié des Belles Lettres, l’Univers s’étageait à mes pieds et toute chose humblement sollicitait un nom, le lui donner c’était à la fois la créer et la prendre. Sans cette illusion capitale, je n’eusse jamais écrit. »

« Je voulais vivre en plein éther parmi les simulacres aériens des Choses. »

« Mes enfants, comme il est bon de rien avoir à se reprocher. »

«  Le génie n’est qu’un  prêt : il faut le mériter par de grandes souffrance, par des épreuves modestement, fermement traversées. »

[A propos des auteurs]

«  Quand ils se sentaient bien malheureux ; ils se disaient : ‘Quelle chance ! un beau vers va naître !’ »

« A mes yeux, ils n’étaient pas morts, enfin, pas tout à fait : ils s’étaient métamorphosés en livres. »

« J’avais tout compris de travers et je faisais de l’exception la règle. »

« Humaniste, mon grand père tenait les romans en petite estime ; professeur, il les prisait fort à cause du vocabulaire. »

« Ils m’ont appartenu, vos génies, je les ai tenus dans mes mains, aimés à la passion, en toute irrévérence. »

« Quand je les ouvrais j’oubliais tout : était-ce lire ? Non, mais mourir d’extase. »

« De ces magazines et de ces livres j’ai tiré ma fantasmagorie la plus intime :  l’optimisme. »

« On pouvait naître condamné ? En ce cas on m’avait menti : l’ordre du monde cachait d’intolérables désordres. »

« J’étais un imposteur. Comment jouer la comédie sans savoir qu’on le joue ? »

« J’étais préparé à admettre […] toutes les maximes […] : que la Vérité et la Fable sont une même chose, qu’il faut jouer la passion pour la ressentir, que l’homme est un être de cérémonie. »

« ‘Mon fils n’entrera pas dans la Marine.’ Faute de renseignements plus précis, personne, à commencer par moi, ne savait ce que j’étais venu foutre sur terre. »

« Quelquefois, je sens la caresse du temps qui passe, d’autres fois _ le plus souvent _ je le sens qui ne passe pas. »

« J’avais autrefois demandé la permission de lire Madame Bovary et ma mère avait pris sa voix trop musicale : ‘Mais si mon petit chéri lit ce genre de livres à son âge, qu’est-ce qu’il fera quand il sera grand ?’ _ ‘Je les vivrai !’. »

« La glace m’avait appris ce que je savais depuis toujours : j’étais horriblement naturel. Je ne m’en suis jamais remis. »

« Fils de personne, je fus ma propre cause, comble d’orgueil et comble de misère ; j’avais été mis au monde par l’élan qui me portait vers le bien. »

« ‘La suite au prochain numéro.’ _ ‘Qu’est-ce que tu dis ?’ demandait ma mère. Je répondais prudemment : ‘Je me laisse en suspens.’ »

« C’était tout, ce n’était rien, c’était tout réduit à rien. »

« La femme qui m’aime est captive. »

« Huit ans de félicité n’avaient abouti qu’à me donner le goût du martyre. »

« Ma vérité risquait fort de rester jusqu’au bout l’alternance de mes mensonges. »

« J’avais rencontré mes vrais juges, mes contemporains, mes pairs, et leur indifférence me condamnait. »

« Neuves et toute écrites, des phrases se reformaient dans ma tête avec l’implacable sûreté qu’on prête à l’inspiration. »

« Si l’auteur inspiré, comme on croit communément, est autre que soi au plus profond de soi-même, j’ai connu l’inspiration entre sept et huit ans. »

«  Je ne fus jamais tout à fait dupe de cette ‘écriture automatique’. »

« Par moments, j’arrêtais ma main, je feignais d’hésiter pour me sentir, front sourcilleux, regard halluciné, un écrivain. »

« J’avais produit dans l’absolu un petit évènement qui me compromettait délicieusement. »

« Je n’étais pas vraiment sadique : ma joie perverse se changeait tout de suite en panique, j’annulais tous mes décrets, je les surchargeais de ratures pour les rendre indéchiffrables. »

« Je découvrais dans l’angoisse des possibilités effroyables, un univers monstrueux qui n’était que l’envers de ma toute-puissance ; je me disais : tout peu arriver ! et cela voulait dire : je peux tout imaginer.  Tremblant, toujours sur le point de déchirer ma feuille, je racontais des atrocités surnaturelles. »

« Il laissait une chance au positivisme : pour étrange qu’il fût, l’évènement devait comporter une explication rationnelle. »

« Je commençais à me découvrir. Je n’étais presque rien, tout au plus une activité sans contenu, mais il n’en fallait pas davantage. »

« J’échappais à la comédie : je ne travaillais pas encore mais déjà je ne jouais plus, le menteur trouvait sa vérité dans l’élaboration de ses mensonges. »

« Je suis né dans l’écriture : avant elle, il n’y avait qu’un jeu de miroirs ; dès mon premier roman, je sus qu’un enfant s’était introduit dans le palais des glaces. Ecrivant, j’existais, j’échappais aux grandes personnes ; mais je n’existais que pour écrire et si je disais : moi, cela signifiait : moi qui écris. »

« Il a la bosse de la littérature. »

« Le professorat laissait des loisirs ; les préoccupations des universitaires rejoignent celles des littérateurs : je passerais constamment d’un sacerdoce à l’autre ; je vivrais dans le commerce des grands auteurs ; d’un même mouvement, je révèlerais leurs ouvrages à mes élèves et j’y puiserais mon inspiration. »

« Voici le nouvel Hugo, voici Shakespeare en herbe ! je serais aujourd’hui dessinateur industriel ou professeur de lettres. »

« Je me résignais à n’être jamais tempête ni foudre, à briller dans la littérature par des qualités domestiques, par ma gentillesse et mon application. »


Et bien oui, l’on dirait bien que je ne vais pas à bout de ce relevé… De retour de Syrie, je n’ai pas spécialement le moral, ni l’envie de poursuivre ce travail… Désolée.

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Commentaires
L
"L'Etre et le Néant", si je ne m'abuse, c'est de la philosophie pure et dure. C'est très différent des romans de Sartre, c'est beaucoup plus complexe ; il faut un certain niveau en philosophie, que je ne possède pas, pour apprécier ce livre. J'en ai étudié un passage au lycée, très intéressant, mais sur lequel nous avions réfléchit plusieurs heures... <br /> Ca ne m'empêche pas de beaucoup aimer le peu que j'ai lu de Sartre, "Huit Clos", et "Les mains sales". Il est toujours à la limite entre littérature et philosophie dans ses romans, et c'est ce qui fait à mon sens, son intérêt. Il pousse son lecteur à la réflexion, tout en employant des mots à première vue anodins. J'ai une amie qui comme toi avait lu "Les mots", et qui depuis a lu tous ce qu'elle a pu trouver de lui (à l'exception des ouvrages trop philosophiques).
S
Lis l'être et le néant, nous verrons ensuite.
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